Pour son premier film en tant que réalisateur, Gilles Legardinier fait le choix d’adapter un de ses best-seller, Complètement cramé !.
À quel moment avez-vous souhaité adapter Complètement cramé ! au cinéma ?
J’ai vendu les droits, mais je n’avais pas pour ambition de réaliser le film. Quand je n’étais pas encore pressenti pour le réaliser, je n’étais pas très investi. Je préférais que le film ne se fasse pas, plutôt qu’il se fasse mal. Comme pour Demain j’arrête !, qui devait être adapté, mais j’y ai mis fin car je n’aimais pas le rendu. Pour Complètement cramé !, j’ai finalement coécrit avec Christel Henon, tout s’est très bien passé, et Christel joue même dans le film.
Comment avez-vous envisagé le travail de réalisateur ? Car Complètement cramé ! est votre premier film.
J’ai travaillé sur de nombreux plateaux de tournage, notamment en pyrotechnie, c’est donc un milieu que je connaissais. Mais lors du tournage, j’ai été extrêmement chanceux car j’étais entouré d’une équipe remarquable. Écrire c’est un travail solitaire, et pourtant j’aime travailler en équipe. Le tournage m’a galvanisé. Quand je ne savais pas, je demandais conseil à ceux qui s’y connaissaient. Aujourd’hui, avec le numérique, faire un film s’est simplifié.
Et comment s’est passé le travail avec les comédiens ?
Nous avons réalisé des lectures en amont du tournage. Par ailleurs, étant scénariste et réalisateur du film, dès qu’ils avaient une question, ils venaient me voir et on discutait. Les actrices et acteurs étaient investis dans leur travail et aimaient jouer, avec le souci de faire du mieux possible.
Est-ce qu’il existe des techniques d’écrivain transposables au métier de réalisateur ?
Dans ces deux métiers, il est nécessaire de faire preuve de sincérité, et il faut être convaincu que ce que vous faites peut avoir de l’intérêt pour une personne à un moment donné.
Le cinéma est l’art de l’incarnation et fait résonner les mots de la littérature.
Quand vous faites jouer des acteurs tels que John Malkovitch ou Fanny Ardant, pensez-vous à leur carrière, et cela vous effraie-t-il ?
Non, car nous travaillons sur le moment présent, même si j’ai conscience que je suis face à deux acteurs impressionnants. Je n’en menais pas large le premier jour du tournage. Je ne pense pas que le succès doit influer sur qui on est. J’ai vendu des milliers de livres, et pourtant ma vie est toujours la même. Le meilleur moyen de faire, c’est désacraliser.
Cependant, je ne comprends toujours pas par quel miracle John ou Fanny ont accepté de venir jouer pour moi.
John Malkovitch avait-il déjà tourné en langue française ?
Oui, mais il m’a confié que son travail pour le film a représenté plus que la totalité de ce qu’il avait déjà tourné en français. Il a énormément travaillé. Il a été d’un professionnalisme hors pair. On a beaucoup rigolé à propos de la prononciation de certains mots français, et je ne voulais surtout pas qu’il perde son accent !
Et comment avez-vous choisi Émilie Dequenne ?
Émilie est une actrice extrêmement précise que je n’avais jamais vu dans la comédie. J’ai fait le pari qu’elle avait ça en elle. Elle a très rapidement été cataloguée comme une actrice dramatique, alors qu’elle est très drôle.
Le décor du film est très impressionnant, avec des pièces bien distinctes les unes des autres. Comment-avez vous fait pour que le résultat final ne donne pas l’impression d’être du théâtre filmé ?
Dans du théâtre filmé, le cadre est fixe. Les sentiments des personnages évoluent et ne se répètent pas, donc la mise en scène n’a pas à se répéter. Dans le choix des cadres, il était important de valoriser les rapports induits entre les protagonistes. Je me suis accroché aux différentes émotions.
Avec Stéphane Le Parc, mon directeur de la photographie, nous avons réalisé un minutieux découpage technique. La géographie du château dans lequel nous tournions impliquait un important travail en amont.
Envisagez-vous de réaliser un nouveau film ?
Mon égo n’a pas besoin d’en faire un nouveau. Si la conjonction est à nouveau belle, on en refera un, et j’espère que je n’attendrai pas 10 ans. J’ai travaillé avec des acteurs hors normes, ce fut un réel bonheur.