Dimanche 19 janvier 2020 était présenté en avant-première Shooting the mafia dans le cadre de la rétrospective Sicilia ! au Festival Premiers Plans d’Angers. Kim Longinotto, la réalisatrice, poursuit son engagement féministe à travers un nouveau portrait de femme.

La cinéaste britannique dresse brillamment le parcours de vie de la photographe sicilienne Letizia Battaglia.

Nous suivons cette dernière dans une profonde introspection, de ses débuts de journaliste à sa rencontre avec la photographie, ses amours et évidemment son engagement militant et politique contre la mafia.

Nous partons à la rencontre d’une femme libre et indépendante, en avance sur son temps. Rappelons que l’Italienne de 84 ans aujourd’hui fut l’une des premières femmes photo-journalistes d’Italie et la seule à consacrer sa vie à la lutte anti-Mafia.

Par un montage alterné fluide, Kim Longinotto excelle dans l’art de fusionner histoire intime et grande Histoire, mais aussi documentaire et fiction. Le film est métonymique de sorte que les instants de vies intimes de la photographe sont un tremplin pour signifier des problématiques historiques et politiques complexes.

Nous nous surprenons parfois à confondre les images d’archives personnelles de la photographe aux extraits de fiction choisis pour illustrer ses paroles. La réalisatrice démontre ainsi la force du documentaire et notre capacité d’association des images.

Shooting the mafia se construit autour d’entretiens avec Letizia Battaglia et ses amants, d’extraits de reportages journalistiques britanniques et italiens, de séquences issues de film classiques italiens et évidemment de photographies.

De temps à autre, l’air célèbre Nel Blu Dipinto Di Blu s’offre comme un souffle d’espoir et de liberté face à l’horreur, la mort, la détresse et la peur.

Enfin, le documentaire aborde également les grandes figures de la lutte contre la mafia, proches de la photographe. Avec émotions, celle-ci se confie sur les assassinats violents des magistrats anti mafia, Giovanni Falcone et Paolo Borsellino en 1992. Le cri d’alerte des Siciliens qui défilent dans les rues, excédés par la corruption qui gangrène leur île, résonne en nous, spectateurs.

Letizia Battaglia exprime avec regrets les photos qu’elle n’a pas su prendre, qu’elle n’a pas pu prendre. Lorsque les corps démembrés sont ceux de ses amis, des héros militants, capturer l’instant devient impossible.

Toutefois, elle le dit elle-même, sa vie a été guidé par le courage, un courage qu’elle n’a pas perdu et qui lui permettra d’accepter la mort.