Humoriste, DJ, animateur de podcast, les casquettes d’Étienne Lautrette sont multiples. Depuis la folle aventure Rendez-vous le 30 juin, débutée en octobre 2022 pour se terminer par deux dates au Trianon en juin 2023, Étienne arpente les plateaux de stand-up, jusqu’à participer à des galas d’humour tels Lillarious.

Actuellement tu joues dans des galas ou des plateaux de stand-up. Est-ce que tu écris pour avoir une heure de spectacle ?

Le spectacle que j’ai joué avec Antoine Piombino au Trianon durait 1 heure, soit 30 minutes chacun. Depuis, j’ai écrit d’autres blagues, donc j’ai actuellement de quoi tenir une quarantaine de minutes. Mais ma base solide dure un peu moins de temps.

Avant nos dates au Trianon, j’avais plein de choses à écrire, je devais me construire. Une fois ces dates passées, on a intégré le circuit stand-up et je me suis rendu compte de mon besoin de travailler mon jeu, ma présence scénique, mes intonations et mes regards, et pas forcément mon texte. Il y a donc un tronçon du spectacle que j’ai joué une centaine de fois. J’apprends à jouer devant un public qui ne me connaît pas, voire qui n’aime pas ce que je fais, mais j’aime cet exercice. Écrire est mon activité favorite, mais je prends énormément de plaisir à être sur scène et à voir les gens rire.

Lorsque tu montes sur scène, tes angoisses sont-elles toujours les mêmes que celles que tu partageais dans vos vidéos ?

J’ai le trac, comme tout le monde, mais ça ne me ronge pas. En fait, c’est plutôt l’auteur, et non l’humoriste, qui a le trac car je livre un texte censé être la meilleure version de moi-même, avec mon nom dessus. L’auteur a le trac et la peur que le public n’aime pas son spectacle. Côté comédien, j’aime être sur scène, donc le trac ne m’empêche pas de jouer. Si je bide, je relativise en me disant que ce texte a déjà fait rire des personnes avant.

Est-ce que l’aventure Rendez-vous le 30 juin t’a donné confiance en toi ?

Le spectacle parle de cette légitimité et de cette crainte qu’on avait de ne pas être au niveau. J’ai eu cette peur que les gens ne m’aiment pas. C’est un défaut, et je ne suis pas fier d’avoir été comme ça. Le fait de franchir cette crainte m’a fait du bien. Prendre des bides ou voir que des blagues ne marchent pas m’a permis d’être moins susceptible, même si ça reste un de mes défauts.

Cette aventure m’a prouvé que si je veux que mes blagues existent, je peux aussi les faire moi-même, que ce soit sur scène ou sur les réseaux sociaux.

J’ai commencé par le podcast, et j’ai mis vingt épisodes de Request In Peace à me rendre compte que ce qui me plaisait, c’était de faire le con, et non de parler de musique. Le confort du podcast, c’était de pouvoir couper si c’était naze. Sur scène, pas de montage possible, mais au pire, les 30 personnes dans la salle ne retiennent pas ton nom, et ce n’est pas très grave. J’ose espérer qu’aucun spectateur n’est rentré chez lui un soir en se disant “Étienne Lautrette c’est vraiment un bouffon”.

Comment vis-tu l’aventure du Random Comedy Club ?

Le Random Comedy Club est un plateau d’humoristes organisé le mercredi et le dimanche soir. Actuellement, on est au Jamel Comedy Club et au Chouchou Hôtel.

C’est une aventure chronophage, mais passionnante. On se considère comme une petite radio, où l’on joue les disques que l’on aime bien. L’équipe est composée de Guiguipop, Antoine Piombino et moi. Guigui et moi sommes DJ, donc on réfléchit à notre programmation d’humoristes et à l’ordre de passage à la manière d’un DJ Set.

En termes d’humour, on essaie de faire le pont entre différents styles qui nous plaisent et on est très fier de notre programmation.

Comment parviens-tu à concilier tes activités de programmateur, d’humoriste et de DJ ?

L’activité de DJ me prend de moins en moins de temps car j’ai un peu levé le pied. Je suis très occupé par mon activité dans les comedy clubs. Cependant, j’anime toujours mon émission de radio mensuelle sur Rinse, composée d’une heure de rigolades et d’une heure de mix. Cette émission est très importante pour moi car elle me permet de parler de deux domaines que j’aime. Prochainement je vais jouer dans un super festival, donc je n’arrêterai jamais la musique, même si je la pratique moins actuellement.

Malheureusement, le stand-up et le DJ sont deux marchés ultra saturés. Si tu n’es pas constamment sur le terrain, le public t’oublie rapidement.

Est-ce que Etienne Lautrette et Etienne4u sont deux entités différentes ?

Actuellement, ce sont deux appellations distinctes. J’ai choisi de signer tout ce que je fais en humour par mon vrai nom. De plus, Etienne4U, mon nom de DJ est inspiré de la série humoristique Nathan for You, donc l’utiliser dans la musique c’est un clin d’œil, mais je trouve que ça serait bizarre de l’utiliser dans l’humour.

Dans l’humour, la plupart des humoristes jouent sous leur vrai nom, alors que dans la culture DJ, presque tous les artistes ont un pseudonyme. 

Ce sont donc deux appellations distinctes, mais je n’ai pas deux personnalités. Que ce soit en humour ou en DJ, je travaille avec la même intention. Faire la fête, s’amuser et rigoler animent ces deux passions. Cependant, j’ai tendance à être plus casse-couille en musique d’un point de vue technique, en raison de mon expérience. En humour, je suis beaucoup plus ouvert, ce qui n’est pas le cas en musique, c’est mon petit côté puriste.

Tu as songé à concilier DJing et humour sur scène ?

Je considère que je le fais dans des événements comme le Pigalle Déconne Club. Le côté hybride fait partie du projet, comme dans Party 4U. Dans ces deux soirées parisiennes que j’organise, talk en public et DJ sets s’enchaînent.

Je n’aime pas ce que fait Marc Rebillet, par exemple. Ce n’est pas une hybridation que j’apprécie. Après, je ne sais pas de quoi l’avenir est fait. Peut-être que je changerai. Mes DJ sets sont marrants, c’est comme ça que je les construits, mais je ne les vois pas comme une blague pour autant.

Un retour avec Antoine sur Youtube est-il prévu ?

C’est la grande question. On ne sait pas encore, mais ce n’est pas notre priorité, que ce soit individuellement ou collectivement.

Et quel avenir pour votre spectacle ?

On a décidé d’arrêter les représentations pour le retravailler. Je ne sais pas encore où ni quand il reprendra. Mettre la charrue avant les bœufs était le concept initial, maintenant, on fait les choses dans le bon ordre. Que ce soit Antoine ou moi, nous sommes fiers du spectacle que l’on a fait et pour le moment on s’interroge sur son avenir.

Aujourd’hui, mon envie première est d’écrire, et j’espère qu’un jour je pourrai dire à quelqu’un que j’ai trop de boulot d’écriture pour accepter un nouveau projet.

Est-ce que ton rythme de jeu actuel te suffit ?

J’aimerais jouer encore plus. Si je pouvais jouer 6 soirs par semaine, je le ferais, mais ce que je préfère, c’est jouer plusieurs fois en une même soirée. Lorsque nous sommes allés à Bruxelles, nous avons joué dans trois plateaux différents en quelques heures, et j’ai adoré ça.

« Je m’éclate dans ce que je fais. Cependant, c’est une situation assez instable, avec un peu d’angoisse et une peur de décevoir mes proches. »

Qu’est ce qu’on peut souhaiter à Etienne Lautrette et à Etienne4u ? Ou aux deux en même temps ?

On peut me souhaiter de continuer. Je m’éclate dans ce que je fais. Cependant, c’est une situation assez instable, avec un peu d’angoisse et une peur de décevoir mes proches. J’espère que ce négatif s’estompera au profit d’un positif qui est déjà hyper kiffant. Quand je rentre chez moi après avoir joué et que ça s’est bien passé, je suis heureux. Les applaudissements de fin de spectacle me font du bien et me donnent la force de continuer.

Quand l’aventure Etienne et Antoine a démarré en septembre 2022, pensais-tu que tu en serais là aujourd’hui ?

Je savais que cette expérience me plairait. J’avais un besoin de me prouver des choses en termes d’écriture. Au départ, j’ai eu du mal à me trouver, contrairement à Antoine. Heureusement, la comparaison entre nous était saine, avec une objectivité lorsqu’on analysait nos prestations. Au tout début, je me suis demandé si c’était vraiment fait pour moi d’être sur scène, et j’ai envisagé d’être seulement auteur. On s’est interrogé sur un modèle à la Kyan Khojandi et Navo. Mais la difficulté et la pression m’ont fait progresser. Notre amour de l’écriture et du jeu nous ont portés.

Rétrospectivement, cette aventure est quand même folle.

C’est un chaud-froid. D’un côté, on sait que c’était un pari fou et qu’on l’a relevé. Mais de l’autre côté, on sait qu’on n’a pas fait avancer la société, c’est assez anecdotique finalement. On oscillait continuellement entre accomplissement et remise en question.

J’ai conscience de la chance que j’ai aujourd’hui, et c’est ça que je trouve fou. Par exemple, on a conscience que c’est un privilège d’être au Jamel Comedy Club avec notre plateau.

Cette aventure a quand même été une mise en avant importante, de nombreuses personnes m’ont découvert grâce à elle.