Découverte grâce à ses nombreuses reprises postées sur internet, Emma Peters sillonne désormais la francophonie, forte d’un premier album de compositions originales, Dimanche, sorti en mars 2022. Rencontre.

En ce début de tournée d’automne, comment as-tu réfléchi à ton show scénique ?

Dès le départ, je savais qu’un clavier allait m’accompagner au vu de la musicalité de mon album. Mais lorsque nous n’étions que 3, je trouvais qu’il manquait cette rythmique propre à la batterie. Grâce à des répétitions, des résidences, on a pu réadapter le show et ne plus se contenter que de la batterie électronique envoyée depuis la régie. J’aime l’idée de pouvoir faire du show un ensemble, un grand morceau, de pouvoir jouer pendant 8 minutes sans m’arrêter. J’ai pu réfléchir à prendre des libertés que je ne m’étais pas autorisées.

Qu’est ce qui t’inspire ? Comment as-tu créé ton album ?

C’est un album que j’ai travaillé de manière assez décousue car je ne me croyais pas capable d’écrire des chansons. Dans ma tête j’allais faire des reprises toute ma vie, et ça m’allait bien comme ça. Quand j’ai compris que j’en étais capable, j’ai été fouillé dans mes sensations, mes sentiments j’ai creusé des étapes de ma vie. Cet album, c’est une découverte de moi même, c’est vraiment très introspectif. Et puis, à force d’amasser des maquettes de morceaux, il y a un album qui s’est dessiné. Cet album, c’est davantage 14 étapes qu’un album conceptuel réfléchi comme une entité. Le fil conducteur c’est ma voix, et surtout ma guitare, car je ne la lâche jamais.

En parlant de ces étapes, est-ce qu’il y a des morceaux qui te représentent plus que d’autres ?

Oui, il y en a auxquels je suis plus attachée et que je préfère chanter sur scène. Terrien est une chanson que j’adore et je savais qu’elle allait ouvrir l’album. Cependant, j’ai été embêtée car je ne trouvais pas la juste manière de la chanter sur scène, c’est pourquoi je ne l’ai pas interprétée lors de la première partie de ma tournée. Mais maintenant on a trouvé la formule parfaite. C’est un texte qui m’introduit, qui me présente beaucoup. Si tu ne me connais pas, c’est cette chanson que je te conseillerai d’écouter pour me découvrir. Je suis également très émue quand j’interprète Je mens sur scène car c’est la toute première chanson que j’ai écrite et que j’ai composée, il y a quelques années maintenant.

Tu disais penser ne pas être capable d’écrire des chansons, pourquoi ?

Je pensais que j’étais nulle à cause de ma façon de parler alors qu’aujourd’hui je sais que c’est une de mes forces. Je suis brute et honnête dans mes textes. Au début, je me disais qu’une fille n’a pas le droit de dire de gros mots, de dire cul, de parler de sexe… Je viens d’une famille très traditionnelle. Quand mon grand-père écoutait mes premiers morceaux, il me disait que je n’avais pas le droit de parler comme ça. Et cette remarque… elle m’a motivé encore plus et je me suis dit que pour la peine, j’allais y aller à fond ! Quand on me dit en interview « Vous êtes une jeune fille, vous utilisez des mots très crus, pourquoi ? », eh bien parce que je t’emmerde en fait. Je parle comme ça dans ma vie et je raconte les choses comme je les pense. Et pourtant ce n’est pas faute d’avoir fait très attention aux formulations, d’utiliser des métaphores, des jolies tournures, mais ça ne marchait pas, ça ne me représentait pas. Cependant, quand je fais écouter mes morceaux à mes parents dans lesquels je parle de sexe, c’est toujours un peu la honte. Je deviens toute rouge et je bois un grand verre d’eau. Mais paradoxalement, l’écriture a été thérapeutique et m’a rapproché de ma famille.

Tu écris régulièrement ?

J’écris très vite et super souvent. En une après midi je peux avoir une démo d’un morceau imaginé quelques heures plus tôt. J’ai une écriture assez instinctive. Depuis quelque temps je recommence à écrire, ce que je n’avais pas fait durant la tournée d’été. Je me suis aménagé une petite pièce pour être tranquille.

Tu t’es fait connaître grâce à des reprises sur internet, comme Gisèle ou Clandestina, comment choisissais-tu ces différents morceaux ?

J’écoute beaucoup de rap français. Je n’ai jamais trop su expliquer comment, mais dès que j’entends une chanson, je suis capable de dire si je vais être compétente pour faire quelque chose avec ou non. Je n’ai jamais réfléchi à la notoriété de la chanson, savoir si l’artiste était connu ou non. Je me suis quand même interrogé sur le référencement de Youtube, et est-ce qu’il ne fallait pas reprendre rapidement des singles beaucoup streamés. J’ai essayé, et à chaque fois ça n’a pas du tout marché. Je me suis donc fiée à ma sensibilité pour le texte ou pour la mélodie. L’important c’est que la musique me parle.

Sur scène, c’est uniquement l’album ou il y a des reprises ?

C’est là toute la surprise ! Il faut venir pour le découvrir, mais il y en a pour tout le monde et pour tous les goûts.

Récemment, il y a eu ta collaboration avec Bon Entendeur qui est sortie, tu peux nous en parler ?

Oui ! Bon Entendeur, ils font partie des premiers à avoir soutenu mes reprises sur internet il y a 5 ans. On s’est croisé sur un plateau radio il y a un peu plus d’un an, ils m’ont parlé du projet de leur nouvel album de reprises, et m’ont demandé si j’étais partante. J’étais très contente, surtout qu’ils sont hyper sympathiques et drôles. C’est moi qui leur ai proposé le morceau Le coup de soleil, que je chantais petite avec mes parents, et ils ont trouvé l’idée géniale. J’ai envoyé un guitare voix, ils sont revenus vers moi avec un remix, et c’était super. Pour le clip, il a été réalisé en Corse par Elisa Baudoin, qui est une fille que j’aime beaucoup, réalisatrice du clip de ma chanson C’est bon, d’ailleurs.

En parlant de clip, quelle place accordes-tu au visuel dans ton travail ?

Autant à l’oreille je sais exactement ce que je veux, j’ai une vraie mémoire auditive, mais en ce qui concerne le visuel je suis très mauvaise. Même pour me sapper c’est compliqué. Heureusement, je suis très bien entourée, comme avec mon label ou Elisa. Mais je donne quand même mon avis ! Je veux vraiment que dans les clips, ce soit ma musique qui soit mise en avant. Je ne suis pas une personne très extravertie, j’ai pas envie de me retrouver en maillot de bain à l’image. L’objectif c’est d’être à l’aise devant la caméra, avec des personnes de confiance, car ce n’est pas un exercice facile.

Qu’est ce qu’on peut te souhaiter pour le futur ?

De toujours réussir à écrire des chansons, d’avoir toujours de la bonne musique à proposer et de rester fidèle à ce que je suis. Et de remplir les salles, aussi, car on sait qu’en ce moment ce n’est pas toujours facile.