Fondé en 2012, le groupe Isaac Delusion est une valeur sûre de la scène pop électronique française. Rencontre avec Jules et Loïc, membres fondateurs de ce projet musical, à l’occasion de la Pop Factory du Grand Mix de Tourcoing.

Vous enchaînez les dates complètes, vous tournez un peu partout. Comment vivez-vous la chose ?

Jules : Plutôt bien ! On part dans le reste de l’Europe à la fin du mois, des festivals cet été… Beaucoup de choses arrivent. Tout se passe extrêmement bien.

Comment expliquez-vous votre succès à l’international ?

Loic : C’est pas vraiment un succès car on s’essaie à des territoires que nous n’avons pas encore conquis, notamment l’Angleterre. Tout est à faire. 

J : Avec internet la musique voyage plus et on se retrouve avec des auditeurs dans le monde entier, ce qui est génial. 

Vous abordez différemment la manière de jouer à l’étranger ?

L : Non, pas du tout ! Ce n’est pas une ville qui va nous faire jouer différemment. On est fidèle à ce que l’on fait et l’objectif est de procurer la même intensité au public, que ce soit dans des clubs ou des grandes salles. 

Quelles sont les inspirations de votre dernier album Uplifters ?

L : On a fait une musique assez ensoleillée. C’est un album d’été qui évoque un côté vacances, évasion, mais qui traite également de notre adolescence. Mais le cinéma et la peinture nous inspirent également. Je mets la musique en parallèle avec les couleurs. C’est un album assez coloré. 

Vous êtes plus été qu’hiver ?

L : Ça dépend. Rust and Gold, notre deuxième album, est un album beaucoup plus dur, beaucoup plus froid. Qui pourrait plus s’inscrire dans l’hiver.

Tu évoquais votre adolescence, il y beaucoup de nostalgie dans votre musique ?

L : Oui, on a toujours gardé en nous une certaine nostalgie. Ce qui est intéressant c’est de se dire qu’on s’est connus au collège, adolescents. On avait des rêves qui sont devenus réalité. Cet album est une sorte d’hommage à cette période.

J : Oui, je pense que c’est plus un hommage que de la nostalgie pure. 

Comment on grandit en musique ?

L : On évolue, et on se voit évoluer. 

J : On a commencé à faire de la musique quelques années après s’être rencontrés. Au départ, on faisait de la musique chacun de notre côté. On s’est retrouvés après. Les premières années de notre amitié ne sont pas musicales. On avait aux alentours de 20 ans quand on a commencé à travailler ensemble. Mais on n’a pas vraiment l’impression d’avoir grandi. C’est un parcours qui s’est dessiné naturellement. 

Aujourd’hui, vous faîtes ce que vous souhaitiez plus jeunes ?

L : Oh non, on était à mille lieues de s’imaginer tout ça, même si ça reste raisonnable par rapport à d’autres artistes de notre génération qui ont des trains de vie encore plus déstructurés que le nôtre. On se s’imaginait pas traverser la France, voir le monde, tout ça en faisant des concerts devant des salles complètes. C’est comme un rêve. Et on remarque que c’est un parcours relativement rare. 

Il y a eu un moment déclencheur ?

L : Non, car ce qu’il y a de terrible dans l’art et dans la recherche artistique, c’est que tu n’es jamais satisfait de toi. Quand t’en arrives à un certain point, tu vois déjà le prochain point que tu souhaites atteindre, et ainsi de suite. C’est infini.

Comment se passe la création musicale dans votre groupe ? 

L : Ça dépend, certains moments se sont faits à deux, d’autres chacun dans notre coin. Mais l’échange est important.

Vous n’avez jamais essuyé de grosses discordes ?

L : Musicalement non ! On a toujours été assez d’accord. On sait faire preuve de diplomatie. 

Et vous êtes plus studio ou plus scène ?

J : Ah bah les deux !

L : Oui, mais plus je vieillis, plus j’ai l’impression que je préfère le studio. Passé 30 ans, faire des tournées, jouer un peu partout régulièrement, ça a quelque chose d’éreintant. Surtout depuis que j’ai un enfant. Plus ça va et plus j’apprécie mon petit confort.

J : On va faire comme les Beach Boys, tu vas rester en studio et nous on va partir en tournée, avec un autre chanteur.

L : Encore faudrait-il trouver un chanteur aussi doué que moi.

Lorsque vous êtes en tournée, vous continuez de composer ?

J : On compose énormément. On adore les petites machines et tout ce qui est bidouillage électronique. Dans le monde de la musique électronique et de la miniaturisation il y a des choses incroyables qui se font, notamment pour les instruments. On en vient à ne plus avoir besoin de grand chose. On est dans le van avec un appareil de la taille d’une calculette, ce qui est assez magique. C’est plus sexy.

Qu’est ce qui le rend sexy ?

J : Le workflow je pense. C’est hyper instructif, et tout se fait à l’oreille. Se référer uniquement au son c’est essentiel.

« Eddy était là-haut sur son nuage, alors qu’il n’est pas mort, et il m’a illuminé. »

Quel lien vous entretenez avec Eddy Mitchell (en référence à leur reprise du morceau Couleur menthe à l’eau ndlr.) ?

J : Des liens complètement inexistants. (rires) 

Il a déjà écouté la reprise ?

L : Aucune idée, mais il y a bien quelque qui a du lui faire écouter quand même. Et sur le coup il a du se dire « Mais qu’est ce que c’est que cette daube ? ». Et en réécoutant il a dit « M’ouais, c’est pas mal. ». Et à la fin « Mais c’est bien ! ».

Pourquoi cette chanson plutôt qu’une autre de son répertoire ?

L : Aucune idée ! Je me rappelle seulement que j’étais dans un escalier, le morceau est passé et j’ai comme eu une révélation. Eddy était là-haut sur son nuage, alors qu’il n’est pas mort, et il m’a illuminé. J’ai de suite posé les accords quand je suis rentré chez moi.

Comment on appréhende le travail de reprise d’un morceau ?

L : Il faut justement choisir le bon morceau, le morceau qui te touche. Le morceau a bien voulu que je le retravaille. J’y ai passé du temps, fais beaucoup d’arrangements, et le résultat final est très satisfaisant.

Vous pouvez nous parler de votre signature chez Microqlima ?

J : Antoine était, et est, notre manager depuis toujours. Quand il a monté Microqlima, on l’a suivi car on avait envie de continuer de travailler avec lui. C’est un plaisir de tout recentrer et de travailler en petit comité. 

C’est un label avec lequel vous vous sentez libres ?

J : Oui, complètement, on fait ce qu’on veut. 

Que ce soit dans les clips ou la création musicale ?

Jules : C’est même la condition de base !

Une réflexion sur la suite et les projets à venir ? Même si uplifters est sorti en novembre dernier.

Loic : On réfléchit déjà à la suite. C’est ça la malédiction du musicien, de celui qui fait de la musique. Quand on te demande de jouer ton album, tu penses déjà à ce que tu vas faire dans les mois ou années qui suivent. Et le fait de faire une tournée fait lourdement gamberger sur ton album, car tu n’arrêtes pas une seule seconde de le retourner dans tous les sens.

À chaud, que vous évoque le nom Pedromadaire ?

J : Un pet de dromadaire.

L : Un dromadaire un peu espagnol.

Merci à Jules et Loic d’avoir répondu à mes questions. Merci à Mélissa d’avoir rendu cette interview possible.