Artiste plus que productif (3 EP, 1 album, 7 singles et 1 remix depuis 2014), et reconnu internationalement, Møme a accepté de répondre aux questions du Pedromadaire à l’occasion de sa venue à l’Aéronef de Lille.
Je me permets de commencer par une question très simple, et que beaucoup de monde a dû poser mais, d’où vient le nom Møme ?
Le nom Møme vient d’un surnom qu’on me donnait. J’ai changé, j’ai rajouté le ø juste pour faire croire que je n’étais pas Français, que l’on ne sache pas tout de suite qui je suis, où je suis. Mon but, avec ce nom, c’était d’être un peu indépendant, un peu underground. Je postais mes sons sur SoundCloud, on ne me connaissait pas et Møme je trouvais que ça sonnait bien.
Ton dernier album, Panorama, tu as été l’enregistrer en Australie, pourquoi ce choix ?
L’Australie était un endroit où je voulais aller depuis que tout petit. C’est le paradis du surf, il y a des grands espaces, il y a ce côté nomade, van qui a commencé à me brancher ado. Malheureusement, ça coute très cher, il a donc fallu que j’économise. En même temps je faisais de la musique. Être à la fois riche et à la fois faire de la musique, c’est compliqué. Pendant deux ans je me suis consacré à ma musique puis je me suis dit qu’il fallait que je parte. J’ai été influencé par des artistes australiens, et toutes mes économies sont passées dans ce voyage. Si ça n’avait pas marché, je me serai retrouvé à la rue. J’ai donc eu de la chance car Aloha a explosé en France et m’a fait jouir d’une belle reconnaissance, et ça m’a permis d’enchainer avec une tournée.
Donc, tu fais du surf ?
Ouais, j’en fais ! Enfin, en ce moment c’est un peu compliqué. La dernière fois que j’en ai fait c’est en septembre car je suis parti à Bali en vacances. J’ai pris ma board, c’était vraiment trop bien. Pour le coup j’ai largement préféré Bali à l’Australie pour ce qui est des spots de surf.
Comment définirais-tu la place qu’a pris le voyage dans tes compositions musicales ?
Avant de partir en Australie, je n’avais pas beaucoup voyagé. J’étais juste parti une fois à Miami et j’avais fait un petit peu l’Europe mais je n’étais pas un voyageur dans l’âme. Le voyage en Australie a été un réel déclic, c’est là que tout a changé. J’ai découvert une autre culture, rencontré des gens à l’opposé de moi, ne plus avoir les mêmes repères. Ma façon de faire en Australie est devenue ma façon de faire de la musique. Une fois revenu d’Australie j’ai commencé à énormément voyager. Je suis parti à Tahiti, aux États-Unis, au Canada… Énormément de chose très intenses, mais ce n’était pas des vacances. Je créais sur la route, j’ai eu la chance de lier le voyage au boulot. Encore maintenant, en tournée, je continue de créer. Hier j’étais à Berlin, j’ai commencé à travailler des morceaux. Mais en écoutant Panorama, je me dis que j’aurais pu faire plus que ça. J’ai tellement de matières que je n’ai pas mises, des morceaux non finis…
« Je créais sur la route, j’ai eu la chance de lier le voyage au boulot. »
Il y a donc un EP ou un album en stock…
Oui ! Il faut que je fasse quelque chose de tous mes morceaux, même si beaucoup vont sortir sous forme de single. Mais je travaille un second album. À partir de janvier, je prévois un petit tour du monde, je vais couper tous les réseaux sociaux. Je serai nul part afin de me focaliser et de me concentrer sur la musique.
Certains qualifient ta musique de pop-électro, d’autres utilisent simplement le terme électro, ou encore chillwave…
Pour me démarquer, je dirai que je fais de la chillwave car mes morceaux les plus populaires, Hold On, Aloha, Alive, même si Alive est un peu plus house, se classent dans cette catégorie là. On parle de chillwave pour ma musique car les Australiens avaient décrit ma musique comme ça. Mais je comprends que chillwave puisse ne pas parler au grand public. De la chillwave c’est de la pop électro avec des sons d’ambiance, une dimension pop au-delà de l’électronique, même si l’électro est censé primer.
Tu as collaboré avec Petit Biscuit pour Gravitation, et on vous voit très souvent ensemble sur les réseaux sociaux. Tu peux nous en dire un peu plus sur cette collaboration ?
On est super potes. Je l’ai rencontré dans le milieu musical. Il m’a invité à un de ses concerts, je suis venu, on a parlé de nos morceaux et depuis on parle exclusivement de ça. On se comprend grâce à la musique. Je me retrouve dans la manière d’être de Mehdi [ndlr. vrai nom de Petit Biscuit]. On essaie d’être dans cette tendance chillwave avec chacun ses spécificités. Il est ultra jeune mais ultra mature. Il est plein de bonnes intentions, et dans ce milieu c’est assez rare pour être remarqué. C’est toujours agréable de rencontrer quelqu’un de vrai. Puis on prépare peut-être d’autres choses pour la suite… Dans tous les cas c’est avec des personnes comme Petit Biscuit que j’ai envie de bosser.
Tu fais de l’électro, mais tu fais également de la guitare et de la basse. C’est toujours un plaisir d’en jouer sur scène ?
Oui, complètement ! J’adore jouer de la gratte sur scène. Au début j’avais une basse mais c’était un peu compliqué donc je l’ai laissé tomber. Mais je suis sur que je la ramènerai dans le futur. La guitare, c’est vraiment une grande passion pour moi, c’est là où j’estime être le meilleur. La guitare me permet d’enlever le côté trop synthétique de la musique électronique. J’aime ce qui groove, je peux en créer avec de la musique électronique, mais en jouer, en faire sortir de l’instrument c’est sans aucun doute une des plus belles choses.
« J’adore jouer de la guitare sur scène. Elle me permet d’enlever le côté trop synthétique de la musique électronique.»
Quelles sont tes inspirations ?
Ça va paraître bête comme réponse, mais j’écoute de tout. C’est d’ailleurs un peu mon problème car je suis en train de composer mon deuxième album et je pars dans tous les sens. Je compose de la trap, du hip-hop, de la techno, de la house… Mais en ce moment il y a quand même des artistes que j’aime énormément comme Kendrick Lamar, Anderson Paak, Kaytranada… J’aime également certaines parties de ce que fait DJ Snake même si c’est complètement différent de ce que je peux faire, avec un côté beaucoup plus mainstream. Il maitrise son sujet et il y a énormément de bonnes idées dans ses prods. Pour revenir à Panorama, j’ai été influencé par le label Future Classic et ses artistes tels que Flume, Hayden James, Chet Faker, Panama…
Puis il y a cette touche hip-hop, notamment pour ta collaboration avec Nieve sur Routine…
J’écoute énormément de rap/hip-hop chez moi ou sur la route. Mais je n’ai pas la culture hip-hop. J’adore ça, mais je n’ai pas grandi avec ce genre musical, contrairement à 20Syl, Chinese Man. Je glisse donc des petites touches hip-hop dans mes morceaux mais de manière modérée.
Est-ce qu’il y a des collaborations qui te font rêver ?
Oui, forcément, des types comme Kaytranada, Pomo, et énormément de personnes du label Roche Musique, comme Darius. Collaborer avec eux ce serait juste énorme. Je connais tellement bien leur univers que je m’estime capable de trouver un compromis entre le leur et le mien.
Tu as débuté sur SoundCloud, quel est ton actuel rapport avec cette plate-forme ?
Je suis un chineur de son, je passe énormément de temps à chercher des petits artistes et certains sont hyper prometteurs. Aujourd’hui je ne poste plus rien dessus, mais elle reste ma référence numéro un pour trouver des nouveaux talents, des nouvelles voix. Il m’arrive très souvent de me taper des aléatoires sur SoundCloud pendant des heures et je découvre énormément de choses merveilleuses. Mon objectif n’est pas seulement de composer, je souhaite également faire découvrir des talents et exposer mon savoir-faire à d’autres artistes très méritants.
« Mon objectif n’est pas seulement de composer, je souhaite également faire découvrir des talents et exposer mon savoir-faire à d’autres artistes très méritants. »
Quelle place prend le visuel dans ton travail ? Que ce soit pour tes clips, tes visuels de singles…
Le travail visuel fait partie intégrante de Møme. Je veux valoriser le côté « univers » de ce que je fais. Ma musique est un ensemble qui prend en compte la musique, le show scénique, les visuels, mais également ma façon d’être et de vivre. Ma manière de créer est la parfaite représentation de ma vision des choses. J’aime retranscrire ce que j’ai vécu au moment de la composition des morceaux.
Est-ce que tu aurais une petite anecdote de tournée à nous révéler ?
Je dirai le slam [ndlr. se laisser porter par la foule, en étant allongée] au Bikini de Toulouse. J’en avais jamais fait avant… Ça ne se voit peut-être pas sur scène mais je suis quelqu’un de timide. Par exemple, je n’ose pas appeler la serveuse pour demander du sel. Je préfère ne pas manger mon plat plutôt que de demander. J’ai très rapidement peur d’être chiant. Donc, pour revenir au slam, je ne sais pas ce que j’avais bu ce soir là mais ça devait être pas mal. Sinon, il y aussi lors de mon show à Rouen, au 106, et que Petit Biscuit m’a rejoint sur scène. J’adore ce côté spontané quand quelqu’un débarque sur scène. Il y a un côté irréel à la chose que j’aime énormément.
Ultime question : qu’est-ce que t’évoque le nom Pedromadaire ?
Dans un premier temps je pense à un dromadaire, bien évidemment. Ou sinon Pedro Winter, qui est à la tête du label Ed Banger Records.
Merci à Jonathan Bertin pour la photo et à Gwendoline Chapelain d’avoir rendu cette rencontre possible.